Si je réfléchis à ce qui m’a amenée à me former à l’hippothérapie, je dirais qu’outre mon intérêt personnel pour les chevaux, c’est l’une de mes patientes confrontée au Burn out, qui, sans le savoir, m’a fait prendre conscience des limites de la psychothérapie. En effet, je constatais lors de nos séances, qu’elle était, malgré son arrêt de travail, toujours aux prises avec ce qu’elle devait faire, ce qu’elle devait être, au lieu d’être à l’écoute de ce dont elle pourrait avoir besoin. En l’écoutant j’avais envie de l’emmener avec moi pour vivre une expérience qui mobiliserait son corps et ses sens pour qu’enfin elle arrête de penser, au moins pour un temps.
Chargée par la culpabilité d’être en arrêt de travail, elle ne s’autorisait aucun plaisir, comme si elle était constamment redevable à la société. Elle était très peu à l’écoute de ses émotions. Elle avait beaucoup de mal à se concentrer sur une tâche précise, tant son esprit revenait sans cesse à son travail qui l’avait débordée. Elle cherchait encore à rendre service à quiconque le lui demandait alors qu’elle était réellement épuisée.
Le Burn out est un état d’épuisement général, à la fois physique, émotionnel et mental avec une dévalorisation massive de ses compétences. Il s’accompagne bien souvent d’une forte culpabilité et d’une incapacité à se protéger, à se ménager. La personne en Burn out a souvent bien des difficultés à dire non, à connaitre ses propres limites et à les faire respecter par l’autre. Des difficultés d’attention et de concentration sont régulièrement présentes également.
Il m’a semblé intéressant de proposer des séances d’hippothérapie à des personnes en Burn out pour leur permettre de se reconnecter à leurs émotions, les entrainer à être à l’écoute de leurs propres envies, elles qui sont toujours attentives à ce que les autres attendent d’elles.
Le cheval « oblige » la personne à être présente à ce qui est en train de se passer. Si on est distrait, le cheval n’en fait qu’à sa tête. Si on ne dit pas stop, le cheval peut envahir votre espace, voire vous faire mal physiquement en vous marchant sur le pied par exemple. Si on ne lui dit pas non, il va brouter ou aller dans un direction que vous ne lui avez pas indiquée. Le cheval permet à la personne de réaliser comment elle fonctionne avec l’autre : qui dans la relation duelle décide de quoi? Est-ce que lorsque vous voulez quelque chose vous le demandez de façon suffisamment claire pour que l’on vous entende? Est-ce que vous tenez bon dans ce que vous souhaitez ou est-ce que vous abandonnez dès que l’autre ne vous suit pas? Est-ce que vous prenez soin de vous ou est-ce que vous faites passer les besoins de l’autre en priorité, quitte à ce que cela devienne inconfortable pour vous? A travers les expériences vécues avec le cheval et les interventions du thérapeute, la personne en Burn out peut prendre conscience de ses attitudes et peu à peu (grâce à l’accompagnement thérapeutique) apprendre à se positionner autrement. Et ces expériences valent souvent mieux qu’un long discours, elles permettent de voir ce que l’on ne voulait/ne pouvait pas voir.
La modification du comportement de la personne a un impact direct sur la modification du comportement du cheval. Cela permet donc aussi rapidement au patient de retrouver confiance en ses capacités et donc de restaurer l’estime de soi bien altérée suite au Burn out.
Constater que l’on peut changer les choses dans sa relation au cheval permet d’oser changer des choses dans sa relation à un autre être humain. Petit à petit les expériences positives avec le cheval peuvent se transposer dans les expériences humaines et amener la personne à mieux se connaitre, mieux écouter les messages que son corps lui adresse et à mieux se respecter.
Le cheval est un booster motivationnel car il vous montre que même si le changement est difficile, il est possible et efficace.
Cette patiente qui m’avait un jour motivée à me former en hippothérapie a terminé sa thérapie « classique » avant que je ne commence ma pratique avec les chevaux. Elle n’a donc pas pu bénéficier de séances d’hippothérapie. Elle est néanmoins sortie de son Burn out et a repris le travail. Depuis, mes chevaux et moi avons accompagné d’autres personnes en Burn out. La grande différence est que j’ai le sentiment que les personnes qui ont bénéficié de l’hippothérapie ont réellement compris de l’intérieur ce que signifie poser des limites, dire non, écouter et faire respecter ses besoins, tout ceci pour ne plus jamais arriver à cet état d’épuisement total si difficile à apaiser.
Parce que comprendre les choses intellectuellement n’est pas aussi puissant que de le comprendre dans ses tripes par l’expérience corporelle, je suis convaincue que l’hippothérapie vaut parfois mieux que le plus merveilleux des discours.
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